samedi 1 décembre 2012

JO 2022


Dans le 24heures du 27 novembre 2012, Monsieur Jörg Schild, président de Swiss Olympic, s’insurge contre le fait que les critiques faites à la candidature de la Suisse pour les Jeux Olympiques de 2022 « portent sur des questions d’argent et de béton et jamais sur des sujets de fond ».
Prenons-en acte, et passons outre au fait que ce Monsieur évoque plus d’une fois la nécessité d’augmenter le montant attribué au sport par la loterie et l’Office fédéral du sport, et qu’il se plaigne de moins recevoir d’argent que la culture et le social. Ne suivons pas son exemple donc, et ne parlons pas d’argent.
Ne parlons pas de béton non plus, puisqu’il nous le demande, encore que je discerne mal en quoi cette question ne relèverait pas d’un sujet de fond, mais bon...
Parlons de sport donc, et uniquement[1].
Il est évident que celui-ci a sa place dans notre monde lorsqu’il désigne l’exercice physique, tant que celui-ci permet l’épanouissement des corps et le développement harmonieux de l’être humain dans sa totalité : Mens sana in corpore sano...
Toutefois nous parlons ici des Jeux Olympiques contemporains.
Ces jeux dont la charte officielle nous parle de joie dans l’effort, de bon exemple, de compréhension mutuelle, d’esprit d’amitié, de solidarité et de fair-play... Toutes choses qui volent allégrement en éclat lorsque l’on se penche, par exemple, sur ce qui se passe sur, et autour d’un terrain de foot, où se re-jouent alors de façon microcosmique toutes les haines, toutes les médiocrités et les infamies de l’humanité. Ces jeux qui prônent l’esprit de compétition en voulant nous faire croire que celui-ci est possible dans le respect de l’adversaire. Ces jeux qui osent encore nous dire que l’esprit olympique peut aider à la paix dans le monde et à l’édification d’un monde meilleur ! Très joli idéal, qu’un bisounours pourrait vanter sur un terrain de basket imaginaire, ou qu’à l’inverse des propriétaires sans scrupules de clubs sportifs d’envergure internationale invoquent de façon totalement hypocrite, mais dont je me demande quelle personne sensée il peut encore tromper.
Car nous parlons ici de sport-spectacle, et de tout ce qu’il implique. A ce sujet, la lecture d’un ouvrage, récemment paru, de Robert Redeker, intitulé L’emprise sportive[2], peut se révéler éclairante, voire édifiante
La thèse principale de cet ouvrage est la suivante : contrairement à ce souvent l’on veut nous faire croire, à savoir que le sport serait un simple exutoire ou une pratique cathartique, « il n’est pas un reflet – selon la croyance d’une plate et paresseuse sociologie, le football refléterait la société, pour le meilleur et pour le pire – mais l’inverse : le sport structure la société, la modèle, la contraint à lui ressembler. » Il s’avère en fait que le sport nous impose, à tort ou à raison, l’idée que la compétition est la première condition du progrès, et que toute existence doit se mesurer à l’aune de la performance et de l’évaluation chiffrée. Son idéologie est d’autant plus insidieuse qu’elle est rarement explicitement exprimée, sauf peut-être dans la perverse devise olympique (plus vite, plus haut, plus fort), devenue l’hymne de l’homme moderne. On ferait bien de s’interroger sur les dommages collatéraux et les ravages psycho-sociaux d’une telle devise...
Et que les instances dirigeantes ne s’y trompent pas. Qu’elles ne croient pas mettre le sport au service de leur Cité, car ce sport « est tout autre chose qu’un outil ou qu’un moyen qui ne modifierait pas qui compte s’en servir ; il est un système total, une machinerie planétaire qui transforme profondément aussi bien les hommes que le rapport des hommes au monde. [...] Il ne peut en aucun cas être repris comme instrument de libération sociale. Le sport n’est pas ambigu : il est le catéchisme hard du capitalisme, de la guerre de chacun contre chacun et de la loi du plus fort. » N’apportant aucun message d’espoir, voué au culte de l’homme-loup, de l’homme gagnant, conformiste et consommateur.
Est-ce ce culte auquel Monsieur Jörg Schild veut que les Suisses se vouent ? Selon lui, « il est important que notre pays se rassemble autour d’un projet d’envergure et redore [son] blason ». Que la Suisse redore son blason, très bien ! Mais pas aux couleurs des grandes marques qui sponsorisent les Jeux, ni en faisant serment d’allégeance aux valeurs perverses de l’Olympisme contemporain !
Car il y va de la survie de tout ce qui résiste au sport-spectacle, et la poésie avant tout. Hölderlin disait que l’homme habite en poète sur cette Terre. Il me chagrinerait qu’il n’y habitât plus qu’en supporter sportif...

Décembre 2012


[1] Je reprends ici des arguments déjà exposés dans un billet daté de juillet 2012 et consacré au projet Métamorphose à Lausanne.
[2] Robert Redeker, L’emprise sportive, François Bourin Editeur, Paris, 2012

mardi 20 novembre 2012

En réponse à un article paru dans Le Temps sur le nouveau projet du parlement.....


Votre article a le mérite de maintenir le débat à un niveau auquel il n’a sans doute pas eu assez droit ces dernières semaines dans la presse, et ailleurs. Il précipite néanmoins en moi quelques réflexions qu’il me plairait de vous faire partager. Car l’indignation que les nouvelles images du toit du parlement suscitent en vous répond certainement à celle suscitée chez d’autres par le projet initial.
Je fais sans nul doute partie de ces « autoproclamés défenseurs du patrimoine » auxquels vous faites allusion (mais faut-il donc être proclamé tel par une instance extérieure pour acquérir une légitimité, quelle qu’elle soit ?), mais me suis toujours inscrit en faux avec les opposants au sujet de l’asymétrie du bâtiment. Celle-ci bien au contraire, me plaisait tout particulièrement, à moi qui fustige plus qu’à mon tour la dictature de l’orthogonalité absolue et déprimante qui s’impose trop souvent dans les projets actuels ! Sans véritablement critiquer le projet Rosebud en lui-même, c’était bien son incongruité dans un quartier historique qui me dérangeait. Et ceci s’explique bien sûr par la solution que j’ai d’emblée défendue de reconstruire à l’identique un monument classé historique hélas dévoré par les flammes et qu’il me semblait évident de faire renaître, fût-ce dans un acte phénixologique...
A l’asymétrie lui préférer l’ère classique ou néoclassique ne me semble du moins pas une atteinte à la mémoire de Perregaux, bien au contraire.
Par ailleurs, le retour à la tuile vaudoise peut peut-être chagriner certains. Le choix, à l’autre extrême, de l’inox étamé était-il pour autant meilleure option ? Le cuivre par exemple, bien plus fréquent dans ce quartier, eût peut-être été préférable, et s’y serait mieux intégré.
Et votre désir de renoncer au nouveau projet plutôt que d’accepter de telles modifications se comprend aisément, de même que certains opposants voudraient continuer d’empêcher toute construction moderne de s’ériger dans la vieille ville. Nous devrons sans doute ici nous rejoindre dans une compromission qui, même si elle déplaît dans une certaine mesure à toutes les parties, permettra au Grand Conseil de siéger à nouveau à la Cité dans un délai raisonnable et décent.
Pour terminer, je voudrais relever qu’en affirmant qu’ « un parlement contraint de se camoufler n’est pas un très bon signe pour la santé de la démocratie », vous oubliez le fait que c’est justement la démocratie qui, à tort ou à raison, a permis le débat, le référendum et l’évolution du projet.
Ces quelques lignes donc pour entamer avec vous, si le cœur vous en dit, un dialogue sans doute enrichissant et instructif.
Bien à vous,
Richard Tanniger

mardi 13 novembre 2012

Nouveau Parlement, suite et fin ( ?)




Une version modifiée du décrié projet Rosebud nous a été présentée aujourd’hui.
Que dire ? Il serait possible de continuer de s’y opposer pour tenter d’obtenir une reconstruction à l’identique du bâtiment détruit par les flammes. Reconstruction que je considère toujours comme ayant pu avoir été la meilleure solution, la plus respectueuse et la plus élégante de toutes. Mais la forme verbale que je viens d’employer est suffisamment éloquente. Nous savons que cette reconstruction ne se fera jamais, car a été lamentablement enterrée à mesure qu’on laissait croupir les restes intouchés par l’incendie du bâtiment Perregaux.
Dès lors, il convient de prendre acte de la situation actuelle. Le projet remanié a l’immense avantage d’avouer au peuple que certaines modifications, que jusqu’à l’acceptation du référendum on nous certifiait être impossibles, l’étaient finalement ! Faute avouée... Même si le projet remanié s’en retrouve appauvri, notamment sur le plan énergétique (mais bon, les standards Minergie et cie, purement et exclusivement technicistes doivent-ils aveuglement s’appliquer dans un quartier historique ? Je ne le pense pas, et n’ai aucun regret de ce point de vue-là !!), il a le mérite de proposer une solution (pensons surtout au changement de l’inox pour des tuiles) qui ne dénaturera pas, trop, le quartier, et tente, plus ou moins, honnêtement de résoudre le conflit. Ainsi les opposants ont-ils réussi à empêcher des dérives qui eussent été fort malvenues dans un quartier historique, et les initiants à défendre tout de même un projet de construction moderne. Il sera sans doute sage de s’en accommoder et de s’en tenir à ces acquis, malgré les regrets que chacun, et j’en suis le premier, en garderont.
Peut-être que je m’incline trop facilement devant le compromis, je ne sais : je ne suis sans doute pas Suisse et Vaudois pour rien... !
Ainsi donc : ils ont laissé pourrir ces ruines durant trop longtemps (à ce sujet il faudrait peut-être encore présenter des excuses en bonne et due forme), ils ont tenté d’imposer un projet inadéquat et incongru, mais ont pris acte de l’ouragan de critiques que celui-ci a provoqué, et proposent maintenant un compromis, que d’aucuns qualifieront sans doute de fade et un peu trop vaudois, mais qui a le mérite de pouvoir mettre fin à une querelle légitime et, enfin, de permettre au Grand Conseil de siéger à nouveau au cœur de la Cité.
Car même s’il me chagrine méchamment que nos élus aient tristement décidé de ne pas reconstruire ce bâtiment, il me chagrinerait, presque autant, qu’ils se voient forcés de laisser encore pendant une dizaine d’années des ruines pourrissantes au cœur de la Cité...

Lausanne, le 13 novembre 2012

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mardi 11 septembre 2012

Blues lausannois... Lettre ouverte aux autorités...




Lettre ouverte aux autorités lausannoises et cantonales, décideurs du projet « Plate-forme Pôle muséal »

Jusqu’au 24 septembre 2012 est mis à l’enquête le plan d’affectation cantonal de la « Plate-forme Pôle muséal ».
Dès que ce projet fut présenté, on érigea, à nouveau, le minimalisme en dogme de la pensée architecturale et urbaniste lausannoise. Dans un éditorial du 24Heures, le rédacteur en chef Thierry Meyer évoquait dans ce choix une « intelligence [...] bien vaudoise, [...] d’une rationalité élégante, d’une audace qui préfère la simplicité à l’esbroufe. » Mais qu’est-ce donc que cette intelligence vaudoise, qui se réfugie dans le pur rationnel, le lisse, le soigné, le conforme, et qui apparemment n’ose plus flirter avec l’exubérance, la fantaisie et le rêve, ne nous offrant plus que surfaces stériles, volumes simplistes, autels voués à l’orthogonalisme (corollaire de la pensée droite) le plus déprimant et le plus fade ? Est-ce donc là toute « l’audace » vaudoise ? Qui ne propose plus au citoyen que de déprimantes infographies grises et cubiques (ou parallélépipédiques) en guise de visions d’avenir ?
Le précédent projet de musée à Bellerive avait pourtant clairement été rejeté, entre autres, pour son aspect bunker et cercueil à chaussures... Mais De gustibus et coloribus non disputandum me répondra-t-on, encore et toujours... Toutefois, en une attitude pathologiquement psychorigide, et, peut-être, par un souci de gloriole testimoniale, nos autorités s’obstinent.
Parlons du rapport au passé alors. Le projet retenu par l’audacieuse élite dirigeante vaudoise oublie que le cahier des charges stipulait que la halle aux locomotives devait être préservée autant que possible. Mais qu’importe la plus petite considération pour le moindre héritage architectural face au credo bassement utilitariste de la densification à outrance qui gangrène peu à peu tout Lausanne ? Car tout bâtiment, à moins d’avoir la chance d’être surclassé et surprotégé, n’est plus envisagé avec condescendance que comme un « témoin sympathique du patrimoine régional », dont on se débarrasse allégrement et sans la moindre compassion. Pour preuve le bâtiment de Francis Isoz, anciennement rue de la Gare 39 que nos autorités ont livré aux pelleteuses de l’empire Edipresse, qui désirait depuis longtemps se débarrasser d’un témoignage de l’héritage architectural du début du 20ème siècle qui ne s’accordait plus avec ses visions d’avenir. Lausanne a clairement amorcé une politique ouverte de démolition. J’en veux pour autre preuve la prochaine démolition du Lausanne Guesthouse, abandonné à la politique d’expansion de la gare CFF, qui certes souffre d’engorgement et d’une explosion démographique qu’il serait peut-être bon de cesser d’encourager (mais ceci est un autre débat), et prétend que la seule solution à sa nécessaire expansion est de détruire et démolir nombre d’immeubles admirables du siècle passé. Les architectes-démolisseurs nous disent leur « obsession de l’intégration à la ville ». J’attends encore que l’on m’explique en quoi leurs surfaces stériles s’intègrent, ou même s’accordent avec leur environnement bâti (à moins bien sûr que la négation de toutes les caractéristiques architecturales qui les entourent ne soit une nouvelle définition de l’intégration... Elle semble en tout cas une définition de l’urbanisme contemporain à Lausanne : son architecture est un manifeste du vide et de la platitude absolue, une négation de tout héritage architectural et patrimonial).
Dès lors, quelle est la logique urbanistique qui amène à concentrer à la gare les principaux musées lausannois ? Alors que visiteurs et touristes pourraient visiter ces musées en parcourant tout Lausanne (tout d’abord l’Elysée, puis Rumine en son centre, et enfin le MUDAC qui les amènerait à parcourir la vieille ville), participant ainsi pleinement et véritablement au dynamisme voulu par les autorités, on les concentre et les confine autour de la gare.
De plus, ce pseudo concept de « Projet plate-forme pôle muséal » fait méchamment penser à un genre de centre commercial de la culture, où tout est à portée de main, à proximité de la gare, qui elle aussi vise au commercial avant tout. Et on sait depuis la reconfiguration du Flon que nos autorités apprécient, et pire encore, vantent le fait que « le cœur de Lausanne tend à devenir un grand centre commercial à ciel ouvert[1] ». Perspective hautement réjouissante, donc....

Je finirai par demander à nos autorités, alors que Monsieur Michel Thévoz, ancien conservateur du Musée de l’Art brut et professeur d’histoire de l’art à l’université de Lausanne, avait démontré que le Palais de Rumine est, et pourrait rester, le lieu idéal du Musée cantonal des Beaux-Arts (et nous sommes nombreux à l’appuyer en ce sens), pourquoi elles ont sciemment ignoré et passé outre ses excellentes compétences en muséologie, et pourquoi elles s’obstinent à vouloir créer un nouveau musée quand celui-ci existe déjà ?



Richard Tanniger

Lausanne, septembre 2012



[1] Olivier Français dixit....

dimanche 22 juillet 2012

Référendum cantonal : Non au toit !




Les Vaudois seront peut-être amenés à voter sur le projet Rosebud du futur Parlement à la Cité.
Ce projet, dont on peut apprécier les qualités architecturales intrinsèques (mais ceci n’est pas l’enjeu du débat) constitue un scandale dès lors qu’on veut l’implanter au sein du quartier historique de Lausanne.

Certes, il est parfaitement « légal ».
Il n’en demeure pas moins que par un brillant tour de passe-passe, ce projet est légal en regard du plan d’affectation cantonal spécialement créé pour lui, mais déroge totalement aux règles imposées à n’importe quel autre bâtiment de la Cité. Ainsi, l’harmonie et la cohérence protégées par le plan d’affectation du site sont-elles allégrement contournées par ce projet. Comment les autorités pourront-elles empêcher par la suite n’importe quel particulier de faire n’importe quoi dans ce quartier, dès lors qu’on leur répliquera qu’elles-aussi s’en sont octroyé le droit ?

Certes, il répond aux plus récentes normes en vigueur en matière de développement durable et de constructions « écologiques ».
Mais on sait que trop souvent ces éco-constructions n’ont que faire de l’intégration esthétique à l’environnement bâti. Il convient aussi de se méfier du terrible effet de mode que l’écologie bien pensante nous impose de nos jours.

Dès le lendemain de l’incendie, face à la destruction d’un important bâtiment néo-classique du tout début du 19ème siècle, l’attitude la plus intelligente et respectueuse eût été de le reconstruire à l’identique. Mais les autorités refusèrent d’emblée d’entrer en matière sur une telle reconstruction. Elles décidèrent, après avoir volontairement laissé pourrir et se dégrader définitivement pendant plusieurs mois, voire plusieurs années, les quelques restes intouchés par cet incendie, de les remplacer par autre chose.

C’est aujourd’hui contre cet autre chose que les référendaires se battent.

Si vous aussi vous vous insurgez contre un tel projet irrespectueux de l’héritage culturel et architectural, contre la volonté d’ériger un bâtiment qui n’a définitivement pas sa place dans un quartier historique, et qui se moque de la préservation de l’harmonie de la vieille ville lausannoise, signez le référendum, disponible sur www.non-au-toit.ch.



Lausanne, le 22 juillet 2012

vendredi 20 juillet 2012

Du rejet de la circoncision




La circoncision est le substitut symbolique de la castration que le père primitif et omnipotent avait jadis infligée à ses fils. Quiconque acceptait ce symbole montrait par là qu’il était prêt à se soumettre à la volonté paternelle, même si cela devait lui imposer le plus douloureux des sacrifices.

Sigmund Freud


La décision des juges de Cologne de remettre en cause la pratique de la circoncision pour motifs religieux soulève nombre de questions fondamentales, qu’elles soient d’ordre anthropologique, religieux, idéologique, pénal, etc.
Cette décision provoque bien évidemment l’ire des grands mouvements religieux concernés, qui invoquent le droit à la liberté de croyance, et insistent sur l’importance de cette pratique en regard des lois fondamentales qui leur sont prescrites par leur dieu et leurs textes sacrés.
Si ces croyants acceptent que de telles lois gouvernent leur âme et leur corps, grand bien leur fasse. Mais il est clair que de les imposer à d’autres, en l’occurrence aux nouveau-nés mâles, ne relève plus d’une liberté de croyance individuelle. Laissons donc aux mâles le choix de se faire volontairement mutiler lorsqu’ils auront atteint un âge suffisamment décent pour ce genre de décision. Car il s’agit bien d’une mutilation génitale, d’une amputation barbare et irréversible, d’une blessure infligée sans impératif médical à un tout jeune enfant et qui, de ce fait, devrait effectivement relever du droit pénal. Et si cette pratique se justifie selon eux car dictée par une loi divine (la circoncision étant établissement d’un pacte d’allégeance entre l’homme et son dieu), il serait bon de leur rappeler que, jusqu’à preuve du contraire, nous ne vivons pas dans un régime théocratique, et qu’il n’y a aucune raison que ces lois prévalent sur celles du code pénal.
En outre, au-delà de ces considérations strictement factuelles, il est fort intéressant de s’interroger, dans une optique plus psychanalytique, sur les raisons symboliques de ceux qui, même non-croyants, s’insurgent contre la décision allemande.
La circoncision institue un lien avec la transcendance, mais en refoulant en l’homme tout signe féminin[1]. Elle détache le garçon de sa mère et, en l’introduisant dans la communauté des hommes, renforce sa masculinité. Ainsi refuser la circoncision reviendrait à s’insurger tout d’abord contre un mode de domination de type patriarcal, mais surtout contre « tout renoncement, pour tout être humain, au jeu bisexuel, sacrilège car il serait rivalité fantasmatique avec Dieu, volonté d’empiétement sur son être[2] », relevant d'une mystique, aspiration ou nostalgie androgyne. Plus simplement, ce serait refuser toute partition exclusive des rôles sexuels. On sent poindre ici les discours misogynes et homophobes,...
Refuser la circoncision (tout comme le refus des lois cérémonielles de la Thora ou du Coran, ainsi que des lois alimentaires) serait une révolte contre le signe de la soumission de l’homme à Dieu, un abandon du monothéisme pour le paganisme.
Tout ceci n'étant bien sûr qu'une ébauche sommaire d'interprétation, mais qu'il serait passionnant de mener plus avant.
On comprend toutefois déjà aisément pourquoi les religions monothéistes, forcément exclusives et intolérantes, mais aussi tous ceux qu’une telle remise en question des rapports entre masculin et féminin au sein de l’individu dérange se sentent si offusqués et menacés...


Lausanne, juillet 2012


[1] « Nunberg a établi le fait que la circoncision peut avoir le sens de la perte de la mère, et a examiné plus en détail la signification du prépuce comme symbolisant le vagin, le rectum et la féminité ». Masud/Khan, « Le fétichisme comme négation du soi », in Nouvelle revue de psychanalyse numéro 2, automne 1970
[2] Roger Lewinter, « Groddeck : (anti)judaïsme et bisexualité », in Nouvelle revue de psychanalyse numéro 7, printemps 1973

mardi 17 juillet 2012

Green lantern...



Nulle ombre de révolte ce soir, ni d'insurrection ou de scandale...


Juste un petit billet sans intentions polémiques, et charmé...


Rentrant chez moi par le pont Bessières, mon septentrion se vit occulté par la silhouette, toujours enchanteresse, de la cathédrale, en cette nuit illuminée d'une étrange lueur verte, presque fluorescente...


Merci à ceux qui oeuvrent à nous offrir ces luminescences décalées, que d'aucuns, sans doute, trouveront déplacées... Mais qu'importe!!


Lausanne s'endormira cette nuit, et moi avec, baignée d'une atmosphère irréelle...