jeudi 26 janvier 2012

LieFlowers, suite...


Quelques petites précisions que je tenais à apporter aux lignes récemment écrites contre le projet Rosebud.
Il me semble y avoir deux éléments bien distincts dans ce débat : le projet architectural en lui-même, et son intégration à la Cité.
En tant que pourfendeur de l’orthogonalité et de ce que je trouve trop souvent être un manque d’originalité, je tenais à exprimer un avis plutôt favorable quant à son toit atypique à très forte pente, et surtout son asymétrie étonnante !
Ce n’est pas l’architecture du bâtiment que je condamne, mais bien le fait que celle-ci n’a à mon avis absolument aucune place dans un quartier historique. Ce n’est pas aux architectes que je m’en prends ici (pour autant bien sûr que ceux-ci daignent tenir compte de l’environnement qui entoure les projets qu’ils proposent), mais aux décisions des politiciens de permettre à un ouvrage de ce type de s’imposer dans la vieille cité. Au non respect du contexte bâti et des règles du plan général d’affectation, à la soumission absolue aux strictes impératifs d’économie écologiste, et, par dessus tout, dans ce cas précis, au choix des matériaux utilisés pour la toiture.
Je ne reviendrai pas sur ma position quant à la nécessité pour moi évidente de reconstruire le bâtiment à l’identique, mais tenais à nuancer mon jugement sur le projet architectural en lui-même.

Lausanne, le 26 janvier 2012

lundi 23 janvier 2012

LieFlowers

Lors du printemps 2002, le siège du Grand Conseil était dévoré par les flammes d’un incendie criminel aux causes encore obscures.
Face à la destruction d’un important bâtiment néo-classique du tout début du 19ème siècle, l’attitude la plus intelligente et respectueuse eût été de le reconstruire à l’identique. Mais on sait hélas depuis trop longtemps que les instances dirigeantes de Lausanne n’ont que faire du respect du passé et de la conservation de son héritage culturel et architectural.
Aussi cherchèrent-elles de nouveaux projets dignes de leurs aspirations modernistes et déhistoricisantes. Et choisirent-elles le projet Rosebud.
Elles décidèrent ainsi, après avoir volontairement laissé se dégrader définitivement pendant plusieurs mois les quelques restes intouchés par cet incendie, de les remplacer par autre chose[1]. Qui rasera les murs d’origine, éventrera une partie de la Cité, et dénaturera un monument d’importance nationale. La note 1 n’a donc plus aucune valeur. Les terroristes urbains peuvent (dés)œuvrer à leur guise.
Cerise sur l’amer gâteau, les services du canton ont sciemment (consciemment ou non) menti tout au long des derniers mois sur la couleur du toit. Car ils ont allégrement laissé la presse locale présenter aux citoyens des photomontages trompeurs, faisant preuve d’une évidente mauvaise foi calculée, ou d’une aveugle incompétence de communication (à vous de choisir...). A ce sujet, Monsieur Marthaler a fait preuve d’une légèreté crasse.
A nous maintenant de nous battre pour la sauvegarde d’une cité abandonnée par ses dirigeants au profit d’une logique « verte » asservie à des objectifs de stricte économie peccamineuse , sans aucune considération esthétique ou culturelle, et vendue aux tristes défenseurs de l’immobilier capitaliste.



Lausanne, le 23 janvier 2012



[1] Je ne présenterai pas ici toutes les ignominies permises par nos autorités. Voir à ce sujet la très pertinente analyse parue dans Patrimoine Lausannois, Journal d’information destiné aux membres du Mouvement pour la Défense de Lausanne, Bulletin no 60, juillet-octobre 2011

mardi 17 janvier 2012

Démolition et crime

Ils le font. Ils osent.
24heures nous le confirme aujourd’hui, l’une des œuvres de Francis Isoz, située au numéro 39 de l’Avenue de la Gare, va être détruite.
Les moellons, les pierres de taille, les briques, les charpentes en bois, matériaux du passé, ne doivent plus exister à Lausanne. Car on ne construit plus avec ces matériaux. Et il importe que même ce qui a été construit de cette façon n’existe plus à Lausanne.
Les références aux esthétiques passées, à la Renaissance française, entre autres, pour le cas qui nous occupe ici, ne doivent plus avoir cours à Lausanne. Ils ne veulent plus que ces valeurs puissent encore embellir la ville. Leur place est au musée, pas dans les rues, ni dans les bâtiments. Par acquis de conscience ( ?), tout au plus quelques babioles seront-elles offertes au Musée historique de la ville.
Puis on fera table rase.
Car Philippe Gross nous le dit : « Cet immeuble a mal vieilli. Il était mal intégré dans le quartier et posait depuis quelque temps des problèmes de sécurité[1] ».
Soyons clairs. Que Monsieur Gross le dise franchement : le bâtiment a vieilli, simplement, et cela ne sied pas à ce Monsieur. Ensuite, s’il présentait des problèmes de sécurité, c’est parce qu’on l’a sciemment laissé « mal » vieillir. Et enfin, dire qu’il ne s’intégrait pas au quartier relève de la mauvaise foi la plus crasse. Car ce bâtiment existait avant les constructions érigées tout autour par Edipresse, et ce sont bien celles-ci qui n’ont aucunement tenu compte de ce à côté de quoi elles s’imposaient. Monsieur Gross le disait d’ailleurs en 2008[2] : « Il [le nouveau bâtiment] s’agit d’une architecture très sobre, qui ne fait pas concurrence à l’emblème qu’est la tour Edipresse et qui s’intègre parfaitement au site ». C’est donc bien le bâtiment de Francis Isoz qui faisait de l’ombre à la tour, et qu’il fallait remplacer par quelque chose qui répondît aux nouveaux critères de sobriété voulus par Edipresse.
Il ne semble aujourd’hui plus possible de s’opposer à ceux qui défendent ces nouveaux impératifs : on le voit, même classé en note 3, un immeuble n’a aucune chance de survie. Seuls des ouvrages classés 2 ou 1 (la cathédrale ou le château de Chillon par exemple) peuvent y prétendre (mais jusqu’à quand ?). Il y a de quoi désespérer.

Je ne peux donc que redire très fort les questions que je posais à Monsieur Gross dans un récent ouvrage[3] :

« Revenant à l’édifice cité plus haut en exemple, je rapporterai les propos du directeur immobilier du groupe en question qui estime que « les qualités intrinsèques de l’actuel bâtiment ne justifient pas son maintien[4] ». Commençant par relever l’arrogance d’un tel jugement, je pourrais poser un certain nombre de questions aux responsables, mercenaires sans scrupules de la spéculation immobilière, de cet acte de terrorisme urbain : qui donc sont-ils pour se permettre de détruire l’œuvre d’une figure importante de l’histoire architecturale de Lausanne ? Qui donc sont-ils pour imposer à l’ensemble de la population leur vision moderniste, épurée, aseptisée et désespérément fonctionnelle de l’architecture ? Qui donc sont-ils pour bombarder tout un pan de l’architecture du tournant des 19ème et 20ème siècles, et pour décider que les quelques vestiges de notre passé ne valent rien, ou moins que leurs créations lisses et déprimantes ? Qui donc sont-ils pour infliger à tous les habitants de cette ville leurs monuments mortifères, vides et immuno-déficitaires ?
Qu’aujourd’hui nous ne construisions plus selon les critères en vigueur il y a plus d’une centaine d’années, soit! Mais pourquoi raser ce qui reste du passé quand d’autres l’estiment et l’aiment encore ? Qu’ils cessent d’imposer leurs médiocres critères de rentabilité et leur indigence utilitaire et bassement mercantile à tout le monde !
Qu’ils construisent leurs horreurs là où le terrain est encore vide (le vide leur va si bien !). Mais qu’ils laissent en place ce qui, ne leur en déplaise, agrée encore à nombre d’habitants d’une cité dont ils ne devraient pas être les despotes, aveuglés par leurs objectifs capitalistes et tristement fonctionnels, encore victime des idées du Corbusier et de ses continuateurs, qu’il s’agirait une bonne fois pour toute de faire comparaître devant je ne sais quel tribunal pour crime contre l’humanité ! ».

Je maintiens ces propos avec la plus grande ferveur, et m’insurge contre les agissements de ces démolisseurs sans scrupule. Et tiens à leur dire une fois encore : honte à vous, qui détruisez peu à peu notre ville, et qui nous faites tomber dans votre dictature immobilière volontairement aliénée de tout héritage culturel et architectural !

Richard Tanniger, Lausanne, 17 janvier 2012


[1] 24heures du 17 janvier 2012.
[2] 24heures du 1er mai 2008.
[3] Du Réel à venir, Lausanne, Les Editions Limitées, 2010, pp. 13-14.
[4] Cité dans le 24Heures du 1er mai 2008.

jeudi 12 janvier 2012

Nouvel-an à Lausanne


S’il y a bien une chose à porter au crédit de l’urbanisme lausannois, c’est le plaisir offert chaque fin d’année à tous les admirateurs de Notre-Dame.
Cette année encore, et durant quelques semaines, la cathédrale baigne dans une froide lumière bleue qui rehausse magnifiquement les splendeurs gothiques qui surplombent la cité, offrant au promeneur une ambiance que n’eût pas dédaignée Tim Burton en son heure de gloire passée...
Mais la plus grande jouissance nous est offerte le soir de la nouvelle année. Depuis 1904, en un exquis paradoxe, on nous permet d’admirer une fois encore le beffroi sublimé par une pyrotechnie en rouge, et en même temps de satisfaire nos pulsions anticléricales par l’autodafé symbolique d’un monument de la chrétienté.
Jouir en même temps de la magnificence architecturale de ce que le christianisme a enfanté de plus beau, et détruire par le feu ce qu’il a représenté, et représente sans doute encore toujours, de pire dans la nature humaine !
Double plaisir esthétique et athée renouvelé chaque année...
Merci Lausane !


Lausanne, décembre 2011

jeudi 5 janvier 2012

Manifeste Bleu


Contre l’hygiénisme et la rationalité puants hérités de l’esprit protestant, mesquin et punitif du Corbusier.
Contre la pensée en série et l’uniformité stériles.
Contre l’asepsie généralisée.
Contre l’ascétisme esthétique et économique.
Contre l’utile et le fonctionnel.
Contre les démolitions abusives.
Contre la densification à outrance.

***

Nous exigeons de replacer au pouvoir la folie et l’imagination créatrices dont dépend notre survie.
Place au tumulte, aux volutes, aux arabesques, aux couleurs, aux courbes et aux excroissances !
Que les agencements des désirs humains phagocytent les obsessions rationnelles des architectes mercenaires de l’immobilier capitaliste,
Pour qu’enfin la réalité s’ajuste aux fantasmes !

Pour un nouveau Surréalisme...





Comité d’Insurrection urbaine