Votre article a le mérite de maintenir le débat à un niveau
auquel il n’a sans doute pas eu assez droit ces dernières semaines dans la
presse, et ailleurs. Il précipite néanmoins en moi quelques réflexions qu’il me
plairait de vous faire partager. Car l’indignation que les nouvelles images du
toit du parlement suscitent en vous répond certainement à celle suscitée chez
d’autres par le projet initial.
Je fais sans nul doute partie de ces « autoproclamés
défenseurs du patrimoine » auxquels vous faites allusion (mais faut-il
donc être proclamé tel par une instance extérieure pour acquérir une
légitimité, quelle qu’elle soit ?), mais me suis toujours inscrit en faux
avec les opposants au sujet de l’asymétrie du bâtiment. Celle-ci bien au
contraire, me plaisait tout particulièrement, à moi qui fustige plus qu’à mon
tour la dictature de l’orthogonalité absolue et déprimante qui s’impose trop
souvent dans les projets actuels ! Sans véritablement critiquer le projet Rosebud en lui-même, c’était bien son
incongruité dans un quartier historique qui me dérangeait. Et ceci s’explique
bien sûr par la solution que j’ai d’emblée défendue de reconstruire à
l’identique un monument classé historique hélas dévoré par les flammes et qu’il
me semblait évident de faire renaître, fût-ce dans un acte phénixologique...
A l’asymétrie lui préférer l’ère classique ou néoclassique ne me
semble du moins pas une atteinte à la mémoire de Perregaux, bien au contraire.
Par ailleurs, le retour à la tuile vaudoise peut peut-être
chagriner certains. Le choix, à l’autre extrême, de l’inox étamé était-il pour
autant meilleure option ? Le cuivre par exemple, bien plus fréquent dans
ce quartier, eût peut-être été préférable, et s’y serait mieux intégré.
Et votre désir de renoncer au nouveau projet plutôt que
d’accepter de telles modifications se comprend aisément, de même que certains
opposants voudraient continuer d’empêcher toute construction moderne de
s’ériger dans la vieille ville. Nous devrons sans doute ici nous rejoindre dans
une compromission qui, même si elle déplaît dans une certaine mesure à toutes
les parties, permettra au Grand Conseil de siéger à nouveau à la Cité dans un
délai raisonnable et décent.
Pour terminer, je voudrais relever qu’en affirmant qu’ « un
parlement contraint de se camoufler n’est pas un très bon signe pour la santé
de la démocratie », vous oubliez le fait que c’est justement la démocratie
qui, à tort ou à raison, a permis le débat, le référendum et l’évolution du
projet.
Ces quelques lignes donc pour entamer avec vous, si le cœur vous
en dit, un dialogue sans doute enrichissant et instructif.
Bien à vous,
Richard Tanniger