dimanche 17 mars 2019

Lettre à Amarelle


Chère Madame,

Enseignant spécialisé en institution à Lausanne, je constate que, depuis votre entrée en fonction, vous visitez un grand nombre d’établissements, vous prenez la température de ce qui s’y passe, et consacrez du temps à y répondre. C’est une excellente chose, et je vous en remercie.
Dans cette optique de renouvellement et de réflexions innovantes, j’aimerais apporter ma pierre à l’édifice des chantiers que vous envisagez de mettre en place. Car il me semble qu’il y a encore un grand absent, et néanmoins point central de tout ce travail : la question de l’architecture scolaire.
En effet, depuis quelques années, les bâtiments scolaires se voient soumis à une esthétique et une architecture pour le moins uniformes, et qui ne sont pas sans poser un certains nombres de problèmes. La question mériterait à elle seule moults études et angles d’approche. Je me contenterais ici d’un seul exemple :
Une récente étude, relayée dans la presse locale (cf. 24Heures du 5 mars 2019), constatait que la qualité de l’air était insuffisante dans deux tiers des classes en Suisse. La conclusion globale, et qui semble simplement relever du bon sens, incitait les usagers à ouvrir les fenêtres et aérer les classes. Dans cette idée, l’OFSP proposait également en ligne un simulateur d’aération, pour permettre d’évaluer la qualité de l’air de nos classes selon le nombre d’élèves et la taille de la classe. Mais ce simulateur, tout comme les invitations à aérer les classes, ne tiennent pas compte d’un problème fondamental : il ne nous est simplement pas possible de le faire ! Car en effet la majeure partie des bâtiments récents imposent de grandes baies vitrées que l’on ne peut ouvrir, au mieux, qu’en impostes insuffisantes. La majorité des bâtiments scolaires sont aujourd’hui pensés et construits selon des standards créés ou inspirés au sein de différents concours d’architectes qui tiennent très peu compte des besoins réels de leurs usagers, à commencer par les élèves. Esthétique lisse, neutre, rompant violemment avec tout l’héritage et le vocabulaire architectural passés, le mouvement brutaliste, parmi tant d’autres, est passé par là, et voue aux gémonies une tradition plus que séculaire. Si l’évolution a du bon, il s’agit également de ne pas tout rejeter le passé , et de continuer à dialoguer avec lui. Ce qui ne se fait plus aujourd’hui.
Je pense que votre rôle et votre position vous permettent d’entamer une réflexion de fond sur cette question, et que vous seriez à même d’enfin remettre en question, ou au moins interroger, le consensus mou qui s’est imposé sur ce sujet depuis plusieurs année.
Aussi je me permets de faire appel à vous pour lancer une réflexion sur cette problématique, que nombre d’enseignants et d’usager, je le sais, demandent depuis longtemps.

J’oserais encore ajouter que la question de l’architecture moderne me soucie depuis bien longtemps déjà, en tant que citoyen et enseignant, et que j’ai déjà publié un petit essai à ce sujet il y a quelques années, que je mets volontiers à votre disposition si vous aviez le temps, l’envie ou l’intérêt de le parcourir, et que je suis à votre entière disposition si vous vouliez que je mène plus avant mes réflexions.

En espérant que vous lirez ce courrier, et en attendant une réponse de votre part, je vous adresse, Chère Madame, mes plus cordiales salutations.


Richard Tanniger